L’homme au gant – Le Titien
Mon fiancé… est au Louvre !
Et bien non, je ne vais pas pérorer sur la Renaissance italienne, Venise et Florence, les Médicis, les peintres, les poètes, les sculpteurs (ou ceux qui étaient les trois, comme Michel Ange)… Je ne parlerai pas des sublimes portraits de jeunes femmes aux longs cheveux blond vénitien et aux allures innocentes de Madone, ni des Madones si tristes avec leur bébé joufflu dans les bras, car le peintre a voulu montrer que la naissance du Christ annonçait déjà le tragique de sa crucifixion… Bon, une anecdote quand même : les femmes de Venise obtenaient ces reflets blond-roux dans leurs cheveux en se les rinçant au jus de citron, puis en les laissant sécher au soleil après le shampooing. On peut d’ailleurs encore voir tout en haut des vieilles maisons vénitiennes la terrasse où elles se réunissaient pour cela… Mais stop ! Je veux vous présenter l’homme dont je suis amoureuse depuis l’âge de 13-14 ans (qui a dit ah, ça fait un bail alors ?!) :
Ce beau jeune homme est anonyme, pas de chance ! On l’a donc appelé fort à propos « l’homme au gant ». Oui, au singulier, alors qu’il tient l’autre dans la main… Est-il juste pensif ? Se tourne-t-il vers quelqu’un qui se tient à sa gauche, à la porte de l’atelier peut-être ? Une femme ? Ou y avait-il plutôt une fenêtre donnant sur la lagune ou le Canale Grande, et il regarde s’éloigner une gondole en rêvant de voyages ? A-t-il commandé lui- même son portrait ou est-ce un cadeau d’une riche maîtresse ? On n’en saura jamais rien et bien sûr, cette aura de mystère qui l’entoure est tout aussi fascinante que son joli minois. Il y a là matière à écrire un livre, me direz-vous. Et bien cela a été fait ! Metin Arditi, un écrivain d’origine turque, a imaginé que ce n’était pas Le Titien qui avait peint ce portrait, mais l’un de ses élèves que le Maître appelait « Le Turquetto » (le petit Turc). L’auteur brode sur Constantinople, Venise, la Renaissance… Je parlerai du livre ailleurs, voici juste sa couverture, vous reconnaissez le détail ?
Où le trouve-t-on dans cette immense musée du Louvre ?
Allez, je ne vais pas être égoïste, je vais vous l’indiquer. Mais que je ne vous prenne pas à le couver des yeux à ma place ! Il est à moi ! Je l’ai vu la première !
Depuis la pyramide, il faut suivre les panneaux vers la peinture italienne, monter le grand escalier vers la Victoire de Samothrace (l’admirer au passage), puis à droite, entrer dans les premières salles où déjà se côtoient Filippo Lippi et Paolo Uccello, Raphaël et Botticelli – excusez du peu. Voici donc les Madones tristes dont il était question plus haut. Vous arrivez alors dans la grande Galerie qui était déjà ouverte au public il y a trois cents ans, avec ses parquets cirés et ses statues néo-classiques (la sculpture grecque est à l’entresol sur la gauche, bien sûr, allez voir la Vénus de Milo, elle est magnifique !). Il y a là le beau Saint Sébastien, quelques Léonard de Vinci auxquels les touristes asiatiques ne font pas attention, tellement ils se dépêchent d’aller voir la Joconde… On est obligé de les suivre quand même, hélas, mais un fiancé vaut bien cette bousculade… La salle est sur la droite, on y voit d’emblée Mona Lisa avec une foule compacte qui se presse devant, oui ceux qui ne l’ont jamais vue de près peuvent y aller, je comprends. Mais je dis toujours à ce moment-là : Retournez-vous et admirez ! Juste en face, Les noces de Cana restauré il y a quelques années, tableau immense couvrant tout un mur, avec les couleurs somptueuses du peintre Véronèse, les hommes en costume de la Renaissance, le banquet, le Christ dans une attitude qui préfigure la Cène, les jarres dont coule le vin et non plus l’eau après le miracle réalisé par Jésus, les chiens… Et des colonnes derrière qui s’ouvrent sur le ciel, symbole d’un plan divin qui surmonte le petit niveau de notre existence terrestre… Il y a dans cette salle non seulement Véronèse et Léonard de Vinci, mais Le Pérugin, le Titien (et d’autres portraits d’hommes pas mal du tout), mais bon alors, il est où ton amoureux Domi ? Juste de l’autre côté de la cloison ! Derrière la Joconde, dans une solitude totale ! Les personnes qui m’accompagnent le prennent en photo et du coup, quelques touristes étrangers aussi, des fois qu’ils rateraient un chef-d’oeuvre, c’est très drôle. je reste un peu, je l’admire, j’ai le droit, non ? Depuis le temps, il pourrait être mon fils, et alors ? Ne suis-je pas juste en train d’apprécier une belle oeuvre d’art ?
2 commentaires
Quelle surprise en notant qu’une autre personne que moi parle de L’Homme au Gant comme son « fiancé »
Pour ma part je l’ai vu pour la première fois en 1961. Je suis tombée « en amour » et depuis je l’appelle également « mon fiancé ».
Lorsque je vais au Louvre je vais toujours le saluer.
Merci d’apprécier ce tableau magnifique.
Moi aussi je suis contente de voir que mon « fiancé » plaît à une autre femme ! Je l’ai connu un peu plus tard, au début des années 70, et je ne manque pas non plus d’aller le saluer (il y a la place 🙂 derrière la Joconde) et de le présenter à la famille en visite en France.
Je penserai à vous la prochaine fois !