Michel Houellebecq – réaliste ? naturaliste ?
Un grand écrivain français
Objectivement, on ne peut le nier, ses oeuvres occupent une grande place dans le paysage littéraire français. Ecrivain, il est aussi poète et cinéaste. Depuis son premier roman, Extension du domaine de la lutte dont l’intrigue se passe dans une entreprise, inspiré par la propre expérience de l’auteur, Houellebecq n’a fait qu’affirmer son style.
Houellebecq décrit le monde dans lequel nous vivons sans fard et sans affèterie. Son narrateur n’a aucune illusion et analyse l’univers qui l’entoure à froid. Que ce soit le monde scientifique, l’univers commercial du marketing, une secte futuriste, le monde de l’art ou la vie académique et politique française, son héros désabusé et vaguement déprimé observe sans rien souhaiter de particulier. Rien ? Pas tout à fait… Chacun de ces hommes accorde une importance privilégiée au sexe. C’est l’occasion pour l’auteur de développer des thèses philosophiques et sociologiques sur nos sociétés occidentales. Ses héros sont dégoûtés du monde, négatifs, pessimistes, et n’attendent rien de la vie sans particulièrement vouloir mourir non plus.
On pourrait le dire réaliste car il n’use pas de métaphores ou de longues descriptions oniriques, ce qui le rapprocherait des grands écrivains de la fin du XIXème siècle , mais il est aussi un naturaliste qui fait penser à Zola pour le discours sociologique. Avec une nuance toutefois, le Nouveau Roman étant passé par là, qui a apporté une méfiance pour le langage et l’utilisation d’un métalangage. Houellebecq lui-même revendique l’influence de Schopenhauer qu’il qualifie de maître spirituel. Ainsi, son style oscille entre un langage parlé des plus crus et une langue très soutenue, ce qui crée parfois un comique de rupture très sympa.
Soumission
Son dernier roman, sorti en janvier, n’échappe aucunement à cette règle. Oeuvre d’anticipation, il est situé en 2022, à la veille des élections présidentielles en France. Le narrateur, spécialiste de Huysmans, enseigne la littérature française du XIXème siècle à Paris III – La Sorbonne et a une liaison avec l’une de ses étudiantes à chaque année universitaire, liaison qui se termine à la rentrée suivante. Lorsque c’est le candidat musulman qui est élu président, tout cela va changer… C’est l’occasion pour Houellebecq de décrire le monde universitaire. Et comme toujours, les situations les plus cocasses, les analyses les plus fines, sont écrites dans un style simple grâce auquel les idées les plus incongrues sont développées comme allant de soi, et l’humour, souvent noir, jaillit au détour d’une phrase.
On a l’impression que les narrateurs de Michel Houellebecq ont tous un caractère commun, où qu’ils vivent, un peu comme le François Pignon cher au cinéaste Francis Veber…